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État de santé des étudiants sages-femmes: Les dessous de la formation au «plus beau métier du monde».

L’univers professionnel des sages-femmes se situe dans le champ de la périnatalité et de la santé génésique des femmes. Ils sont autonomes et responsables de leurs actes ce qui leurs donne une place centrale en tant qu’acteur de santé. Régulièrement, les médias évoquent le mal-être des professionnels de santé. Malheureusement, ces situations de mal-être n’épargnent pas les étudiants sages-femmes. Afin de cibler les principaux problèmes, une enquête nationale dresse un état des lieux de la santé physique et mentale des étudiants en maïeutique.

Recevant de nombreuses demandes d’aides ainsi que des témoignages de souffrance de la part d’étudiants en difficulté; l’ANESF (Association nationale des étudiants sages-femmes) a lancé son enquête bien-être afin d’avoir des chiffres objectifs et de cibler les principaux problèmes. Les données ont été recueillies entre le 13 mars et le 9 avril 2018 par un questionnaire diffusé sur les réseaux sociaux, le réseau des administrateurs de l’ANESF et envoyé à toutes les directrices des structures de formation de maïeutique pour maximiser sa diffusion. Ce ne sont pas moins de 2428 étudiants sages-femmes qui se sont exprimés, autrement dit plus de la moitié des effectifs. Ces données ont été analysées par Joséphine Miloche, Vice-Présidente en charge des Questions Sociales de l’ANESF, avec l’aide du bureau national de l’ANESF et du Collège National des Sages-Femmes.

Le constat est alarmant, 7 étudiants sur 10 sont en dépression et certaines de ces dépressions sont sévères. Par ailleurs, 41 % des étudiants en maïeutique déclarent que leur santé s’est « dégradée » ou « fortement dégradée » depuis leur entrée en formation et 80 % se sentent plus stressés contre 59 % dans la population étudiante générale. Un stress dont la fréquence augmente au fur et à mesure du cursus et dont l’intensité est globalement très élevée.

Les stages constituent la première cause de stress, les étudiants redoutent les situations d’urgence et chargées d’émotions auxquelles ils ne sont pas préparés. De surcroît, le système d’évaluation des compétences sur le terrain est fait de telle sorte que les étudiants sont en permanence observés et jugés. Ainsi, «ils n’ont pas le droit à l’erreur et la pression est énorme» comme le souligne Julie Kerbat, la présidente de l’ANESF. De plus, les maltraitances verbales ou physiques dont se rendent coupables certains sages-femmes cliniciens sont, elles aussi, source de stress et de dépressions. En effet, 61 % des étudiants disent avoir été maltraités en stage. Les témoignages font état de remarques humiliantes portant sur le sexe, le physique le statut des étudiants mais aussi de gestes déplacés ou violents.

Plus alarmant encore, face aux difficultés rencontrées, un étudiant sur trois ne se sent pas suffisamment accompagné par l’équipe pédagogique. Les temps de formation consacrés au retour d’expérience, à l’écoute et au soutien psychologique sont trop rares. Cependant, pour pallier ce manque de soutien, un certain nombre d’écoles a mis en place des bilans de stage essentiellement collectifs encadrés par des psychologues ou des sages-femmes enseignants, une initiative encore trop rare. L’ANESF propose une généralisation de ces bilans et a formulé d’autres propositions de solutions efficientes et pérennes. Parmi elles, la mise en place d’un temps de présentation du service et de l’équipe clinicienne en amont des stages ainsi que plus d’enseignements portant sur le savoir-être et les relations aux patients. L’association suggère également de créer un statut de maître de stage pour les sages-femmes volontaires avec une formation pédagogique pour encadrer les étudiants. L’un des objectifs de cet état des lieux est la démocratisation de ces outils, il a également pour vocation de servir de tremplin pour lancer des pistes de réflexions et des discussions entre tous les acteurs concernés qui permettront peut-être d’améliorer le sort des étudiants sages-femmes dont 27 % ont déjà envisagé d’arrêter leurs études.

 Labrousse Clara

Sources:
« Contexte – ANESF – Association Nationale des Etudiants Sages-Femmes »
« Dossier de Presse – ANESF – Association Nationale des Etudiants Sages-Femmes »
« Études de santé : 7 étudiants sages-femmes sur 10 en dépression »
« Anxiolytiques, antidépresseurs… Sept étudiants sages-femmes sur 10 sont dépressifs ». Le  Figaro Etudiant